top of page
  • Facebook

Les thés sombres, des thés de garde, vendus comme des grands crus

Photo du rédacteur: maisondethemanamaisondethemana

Encore peu connus des amateurs européens, les thés sombres ou thés Pu'erh, s'arrachent pourtant à prix d'or en Asie. Plus ils sont vieux, plus ils se vendent chers, et pour cause, tout comme les grands vins, ces thés ont la particularité de se bonifier avec le temps. Les nombreuses vertus, que leur attribue la médecine chinoise contribue à leur valeur .



Du thé contre des chevaux


L'écrivaine Lucie Azéma documente très la manière dont les Chinois gardèrent longtemps le monopole du thé et en firent une monnaie d'échange contre les chevaux dont l'Empire avait besoin pour assurer sa grandeur. Ainsi bien avant que le commerce du thé ne se mondialise, celui-ci avait sa propre route. Celle-ci se confondant avec la célèbre route de la soie, empruntant les chemins des contreforts de l'Himalaya pour traverser l'Asie. Le thé servait alors de monnaie d'échange dans le commerce des chevaux. A l'époque de la dynastie Song ( 960-1279) , il pris une telle ampleur que l'Empire créa une Agence du thé et des chevaux. Le thé transporté sur les flancs des bêtes, étaient échangé contre des chevaux mais aussi contre du musc, de la laine ou du sel.

"Partant de collines vert émeraude, traversant un rideaux infini de montagnes jusqu'à atteindre le plateau tibétain, durant des semaines, parfois des mois, le thé a été transporté dans une hotte ou sur le flanc chaud d'un animal : là il continuait à fermenter poursuivant son chemin vers la grande famille des thés sombres." L'Usage du thé, Lucie Azema.

Les Chinois cuisaient alors les feuilles à l'étuvée dans des paniers de bambou, puis les compressaient en galettes de thé afin qu'elles puissent voyager. Cette manière de transformer le thé est parvenue jusqu'à nous. Les feuilles sèches des thés Pu'erh sont étuvées quelques minutes. Elles sont ensuite placées dans un tissu de coton pour être passées entre les plaques d'une presse afin de former les galettes de thé. Achetées ainsi par des intermédiaires, elles sont parfois mises à vieillir pendant de nombreuses années. Les thés sombres sont désormais vendus emballés dans de délicats papiers de soie, perpétuant ainsi le lien entre avec le précieux textile avec lequel ils ont longtemps partagés la route.


Les Pu erh, des thés qui affolent les marchés


Nous retrouvons les thés Pu'erh à Hong Kong dans les années 1930. Très prisés par une minorité aisés, ils sont essentiellement consommés dans les maisons de thés où se retrouvent hommes d'affaires, riches commerçants et autres pour déguster un thé et manger tout en partageant un moment de convivialité.

Les maisons de thés se multiplient sont alors nombreuses. Tout s'effondre dans les années 1990 à l'approche de la rétrocession de Hong Kong à la Chine. Celle-ci affole les milieux commerçants et de nombreuses maisons de thés revendent à bas prix leur stock de thé. Parmi eux se trouvent de nombreux thés Pu erh, vieux de plusieurs dizaines d'années. Les Taïwanais, au pouvoir d'achats plus élevé s'en empare pour les stocker à leur tour, misant sur une futur augmentation de la demande. Ces derniers sauront valoriser ces thés afin d'en augmenter la valeur. Améliorant au passage les techniques de stockages, ils travaillent ces thés afin d'obtenir des thés âgés d'une grande finesse. Il ne s'agit plus uniquement d'assombrir les thés. Des spécialistes se penchent sur leur maturation et travaillent à les perfectionner sur le plan gustatif. A cela s'ajoute un processus complexe de spéculation.



70 000 euros pour une galette de thé Pu'erh !


Depuis le début des années 2000 les prix des thés Pu'erh s'envolent. La prospérité de l'économie chinoise expliquant en partie ce phénomène. L'année 2007 a connue une hausse spectaculaire des prix des thés Pu'erh sur le marché asiatique. ainsi à l'automne 2013, un thé Pu'erh, vieux de 80 ans, a été adjugé 1,25 millions d'euros les 2kg. Soit, près de 600 euros le gramme ! Ce qui amène le prix de la tasse à 3000 euros, certainement une bagatelle pour les nouveaux milliardaires chinois. Certaines familles chinoises sont ainsi devenues multimillionnaires en revendant des galettes de quelques centaines de grammes, achetées autrefois à bas prix et revendues jusqu'à 70 000 euros pièce. Désormais des galettes de thé Pu'erh ( d'un poids de 300g en moyenne ) se vendent pas moins d'un millier d'euros à la foire du thé de Canton. Les Pu 'erh Sheng, c'est-à-dire crus et prêts à être mis à fermenter autrement dit à vieillir, sont les plus recherchés. Les amateurs qui investissent ainsi dans des galettes jeunes espérent spéculer sur leur revente quelques années plus tard tout comme nous le faisons en Europe avec les vins grands crus.


Aujourd'hui l'engouement pour les thés Pu'erh l'Occident. Les amateurs de thés Américains et Européens commencent à découvrir et à apprécier ces thé post-fermentés qui se bonifient avec le temps. Plus qu'une affaire de snobisme, leur qualité gustative mais aussi leurs multiples bienfaits séduisent. le thé Pu' erh est ainsi apprécié non seulement en raison de sa capacité à se bonifier avec le temps, mais aussi pour les vertus médicinales que lui prêtent la médecine chinoise.


En Chine, les thés Pu'erh ont longtemps été le privilège de l'empereur en raison de leurs précieuses vertus. Au sein de la médecine traditionnelle chinoise les thés pu'erh sont classés parmi les plantes médicinales. Ils sont en effet réputés pour favoriser la perte de poids, et réduire efficacement le taux de cholestérol. Et ce n'est pas tout, les thés pu'erh seraient également détoxifiants et renforceraient le système immunitaire. Il a également été démontré par plusieurs études pharmacologiques que les thés Pu'erh sont des piègent les radicaux libres.


"Le mystère d'une promenade en forêt"


" Une odeur de maison de grand-mère, de vieille malle" ou encore "le mystère d'une forêt en automne" c'est avec ces mots que Madame Tseng décrit les parfums qui remontent d'une tasse de thé pu'erh. Elle est la seule femme maître de thé dont la réputation est reconnue à l'internationale auprès des grands chefs comme dans le milieu du négoce du thé. C'est aujourd'hui l'une des spécialistes reconnue des thés Pu'erh.


Longs et ronds en bouche, les thés pu'erh offre par ailleurs un profil aromatique unique. Ils se caractérisent notamment par leur parfum boisé. Sans amertume leur infusion est une véritable caresse pour le palais. D'une grande naturalité, les notes qui remontent d'une tasse de vieux pu'erh évoquent le parfum doux, terreux et frais d'un sous bois humide, lors une promenade en forêt. On n'y perçoit des notes terreuses, argileuses et parfois même de cave. Certains pu'erh développent des parfums de cacao. La palette aromatique variant selon l'âge du thé. Un pu'erh de qualité peut être ré infuser une dizaine de fois. Au fil des infusions les notes devenant plus minérales et la liqueur plus légère.



Les Pu'erh traditionnels chinois sont vendus en galettes moulées d'un poids standard de 357 grammes. La technique de transformation du thé pu'erh gagne désormais d'autres pays, ainsi une plantation situé au Malawi a récemment remporté une médaille d'or au concours Paris Gourmet pour son excellent thé sombre aux notes douces cacaotées, et légèrement argileuses. Les pu'erh se consomment également parfumés, comme dans les fameuses mandarines de thés pu'erh, une méthode de conditionnement traditionnelle venue d'Asie qui imprègne le pu'erh des effluves naturelles d'écorce. Certains grands chefs étoilés tels que Pierre Gagnaire ont désormais intégrés les thés pu'erh non seulement dans leur cuisine, mais également en dégustation avec des rituels tels que la découverte d'une grand cru du thé à la fin d'un repas. Au pays des vignobles de prestiges et des châteaux à vin, les grands crus du thé, et notamment les thés pu'erh seraient-ils en train de détrôner les bouteilles millésimées ?








11 vues0 commentaire

Posts récents

Voir tout

Comments


bottom of page